Un banquet à la papeterie pour les médaillés avec ancienneté, journaux 1909

De GrandTerrier

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Une grande fête donnée en août 1909 à Odet pour les anciennetés remarquables des ouvriers, ouvrières et contremaîtres papetiers, alors que les grèves éclatent sur le territoire national.

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Articles des journaux Ouest-Eclair [1], Dépêche de Brest [2], Union Agricole [3], Progrès du Finistère [4], Courrier du Finistère [5], couvrant la fête d'obtention des médailles et les listes de médailles d'honneur.

Autres lectures : « René Bolloré (1885-1935), entrepreneur » ¤ « René-Guillaume Bolloré (1847-1904), entrepreneur papetier » ¤ « Généalogie BOLLORÉ » ¤ « Jean Pierre Rolland (1855-1914), papetier » ¤ « 1925 - Famille Rannou de Kerangueo-Odet et Cascadec » ¤ « Mae Kergoat-Guéguen (1859-1938), née Léonus, contremaitresse de papeterie » ¤ « 1880-1900 - Ouvriers de la papeterie d'Odet » ¤ « 1894 - Ouvrières de la papeterie d'Odet » ¤ « La fête du centenaire des papeterie Bolloré en 1922, cartes postales Villard » ¤ 

Présentation

En 1909 des grèves dures et généralisées se multiplient en France : les fonctionnaires des PTT, des ouvriers du bouton dans l'Oise, les ouvriers délaineurs de Mazamet ... Dans ce contexte les journaux suivants locaux ont salué une situation où les conflits sociaux semblent absents, ce avec des titres évocateurs : « Entente cordiale » et « Bons patrons, bons ouvriers ».

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L'ancienneté de ses ouvriers et contremaîtres est considérée comme la marque de fabrique de la maison Bolloré : « Ces usines sont, peut-être, les seules à compter une aussi forte proportion de décorés, puisque près d'un quart du personnel est médaillé ... Quant aux contremaîtres, celui de Cascadec a 43 ans de services et 23 ans de contremaîtrise ; celui d'Odet 29 ans de services, dont 16 de contremaîtrise.  »

L'initiative des nouvelles médailles revient au nouveau patron papetier René Bolloré qui a succédé en 1905 à son père décédé ; ainsi peut-on lire dans les listes de médaillés les mentions « maison Bolloré fils et Cie » ou « maison R. Bolloré ». Tout jeune patron il a dû jouer de son influence auprès des instances nationales pour offrir les médailles du travail à son personnel.

Mais en 1909 « sur 255 ouvriers et ouvrières que compte le personnel de ces usines, 17 avaient déjà la médaille d'ancienneté de services pour plus de trente ans de séjour consécutif », ce qui veut dire que l'ancienneté a largement été encouragée par les patrons Bolloré du siècle précédent.

Jean Pierre Rolland, 1911
Jean Pierre Rolland, 1911
En 1909 le record d'ancienneté est celui du contremaître de Cascadec avec 43 ans de services, à savoir Jean-Pierre Rolland, né à Ergué-Gabéric en 1855, embauché très jeune comme aide-ouvrier au moulin à papier d'Odet. Sa médaille d'honneur des 30 ans de services est mentionnée dans le Courrier du Finistère de 1898. Il est envoyé en 1893 au moulin à papier de Cascadec pour assurer le démarrage de la nouvelle usine. Si l'on décompte 43 ans de services, cela veut dire qu'il a été embauché en 1865 alors qu'il a à peine 10 ans.

Mae Kergoat, 1930
Mae Kergoat, 1930
Les contre-maîtresses ne sont pas du reste : Marie Léonus, surnommée Mae Kergoat et épouse Le Torrec, puis Guéguen, est née en 1859. Sur le registre des employés de 1927, elle est celle qui a la plus grande ancienneté, elle est inscrite comme « maitresse », « âgée de 68 ans », avec « 59 ans de service », ce qui fait qu'elle a été embauchée en 1868 à l'âge de 9 ans. En janvier 1901, elle reçoit la médaille d'honneur pour 30 ans de service avec comme fonction de « maitresse de chiffonerie ».

René Rannou, 1925
René Rannou, 1925
Le contremaître d'Odet mentionné dans l'article de 1909, né 9 ans après JP Rolland qu'il ira remplacer à Cascadec. Sur le journal de 1912 on le trouve dans la liste officielle des médailles d'honneur de plus de 30 ans de services. Il a donc été embauché à Odet comme ouvrier en 1880 à l'âge de 14 ans.

On ne dispose pas de la liste complète des 66 ouvrières et ouvriers médaillé(e)s, mais sur la base des listes des médailles d'honneur on peut citer : Mmes Coathalem Jeanne et Feuntun Aline, ouvrières (médailles des 30 ans en 1898) - Joseph Auffret, magasinier ; Alain Coathalem, manœuvre ; Jean Le Mao Jean, manœuvre ; Marie-Perrine Le Mao et Marie-Anne Le Moal, trieuses ; Pierre Pern Pierre, charretier (liste 1901) - Mme Mao, née Istin, Mme Narvor, née Léonus, Mme Philippe, née Signour, ouvrières (liste 1909).

Transcriptions

Ouest-Eclair

Entente cordiale entre Ouvriers et Patrons

Après les divertissements entre patrons et ouvriers, qui ont éclaté un peu partout, ces temps derniers, nous sommes heureux de signaler les ententes cordiales.

Un bel exemple vient de nous en être donné, le premier de ce mois, par les papeteries à cigarettes d'Odet et de Cascadec (Finistère), fondées en 1822.

Sur 255 ouvriers et ouvrières que compte le personnel de ces usines, 17 avaient déjà la médaille d'ancienneté de services pour plus de tente ans de séjour consécutif ; mais, le 1er août, M. Bolloré remettait en plus les 66 médailles qu'il avait obtenues du gouvernement et de l'Alliance des Chambres syndicales de Commerce et d'Industrie, dont le siège est à Paris, pour 30 et 20 ans de services.

Ces usines sont, peut-être, les seules à compter une aussi forte proportion de décorés, puisque près d'un quart du personnel est médaillé : 22 pour plus de 30 ans, et 38 pour plus de 20 (au total 83 médailles entre 60 ouvriers).

Quant aux contre maîtres, celui de Cascadec a 43 ans de services et 23 ans de contre maîtrise ; celui d'Odet 29 ans de services, dont 16 de contre maîtrise.

C'est un bel exemple qui fait autant d'honneur au patron qu'aux ouvriers.

A la suite de la remise des décorations, un grand banquet réunissait, à la papeterie d'Odet, dans une salle artistement décorée par les papetières elles-mêmes, tous les employés et décorés.

Progrès du Finistère

Ergué-Gabéric. - Une fête ouvrière à la Papeterie. - Dimanche dernier, grande fête et festin à la Papeterie d'Odet. M. Bolloré attribuait 66 médailles données par le gouvernement et par l'Alliance des chambres syndicales de Paris pour plus de 30 et de 20 années consécutives « de bons et loyaux services »

Sur 255 ouvriers et ouvrières que compte le personnel des Papeteries d'Odet et de Cascadec, 22 se trouvent à l'heure actuelle médaillés pour plus de 30 ans et 38 pour plus de 20. Au total 83 médailles entre 60 ouvriers.

C'est un rare et bel exemple, surtout par les temps aussi troublés que ceux que nous traversons.

Gloire et prospérité toujours croissance à cette grande et belle famille ouvrière !

Dépêche de Brest et Union Agricole

Bons patrons, bons ouvriers

Sous ce titre nous lisons dans la Dépêche de Brest :

Après les dissidences, entre patrons et ouvriers, qui ont éclaté un peu partout, ces temps derniers, nous sommes heureux de signaler les ententes cordiales.

Un bel exemple vient de nous en être donné, le 1er de ce mois, par les papeteries à cigarettes d'Odet en Ergué-Gabéric et de Cascadec en Scaër, fondées en 1822.

Sur 255 ouvriers et ouvrières que compte le personnel de ces usines, 17 avaient déjà la médaille d'ancienneté de services pour plus de tente ans de séjour consécutif ; mais, le 1er août, M. Bolloré remettait, en plus, les 66 médailles qu'il avait obtenues du gouvernement et de l'Alliance des Chambres syndicales de Commerce et d'Industrie, dont le siège est à Paris, pour 30 et 20 ans de services.

Ces usines sont peut-être les seules à compter une aussi forte proportion de décorés ; puisque près d'un quart du personnel est médaillé : 22 pour plus de 30 ans, et 38 pour plus de 20 (au total 83 médailles entre 60 ouvriers).

Quant aux contre-maîtres, celui de Cascadec a 43 ans de services et 23 ans de contre-maîtrise ; celui d'Odet 29 ans de services, dont 16 de contre-maîtrise.

C'est un bel exemple qui fait autant d'honneur au patron qu'aux ouvriers.

A la suite de la remise des décorations, un grand banquet réunissait, à la papeterie d'Odet, dans une salle artistiquement décorée par les papetières elles-mêmes, tous les employés et décorés.

Médaillés de 1898 (Courrier du F., Union Agricole)

Médailles d'honneur

Voici la liste des ouvriers et employés du Finistère ayant plus de trente ans de service dans le même établissement, auxquels le ministre du commerce, de l'industrie, des postes et des télégraphes vient de décerner une médaille d'honneur :

  • M. Rolland Jean-Pierre, ouvrier dans la maison Bolloré, à Ergué-Gabéric ;
  • Mmes Coathalem Jeanne et Feuntun Aline, ouvrières dans la maison Bolloré, à Ergué-Gabéric ...

Médaillés de 1901 (Union Agricole)

Médailles d'honneur

A l'occasion du 1er janvier, des médailles d'honneur ont été accordées par le ministre du commerce, de l'industrie et des postes et télégraphes, aux ouvriers ou employés dont les noms suivent :

  • M. Auffret Joseph, magasinier dans la maison Bolloré à Ergué-Gabéric.
  • M. Coathalem Alain, manœuvre dans la maison Bolloré à Ergué-Gabéric.
  • M. Le Mao Jean, manœuvre dans la maison Bolloré à Ergué-Gabéric.
  • Mme Le Mao Marie-Perrine, trieuse dans la maison Bolloré à Ergué-Gabéric.
  • Mme Le Moal Marie-Anne, trieuse dans la maison Bolloré à Ergué-Gabéric.
  • M. Pern Pierre, charretier dans la maison Bolloré à Ergué-Gabéric.
  • Mme veuve Torrec Marie maîtresse de chiffonnerie dans la maison Bolloré ...

Médaillés de 1909 (Ouest-Eclair)

Médailles d'honneur du travail

Des médailles d'honneur sont accordées aux ouvriers ou employés dont les noms suivent :

Finistère.

  • Mme Mao, née Istin, ouvrière dans la maison Bolloré fils et Cie à Ergué-Gabéric
  • Mme Narvor, née Léonus, ouvrière dans la maison Bolloré fils et Cie à Stang-Wen en Ergué-Gabéric
  • Mme Philippe, née Signour, ouvrière dans la maison Bolloré fils et Cie à Kéranguéo en Ergué-Gabéric ...

Médaillés de 1912 (Union Agricole, Ouest-Eclair)

Médailles du Travail

Des médailles d'honneur sont accordées aux ouvriers ou employés de notre région dont les noms suivent :

  • M. Nicolas Floch, employé dans la maison R. Bolloré, à Keranguéo, en Eergué-Gabéric
  • Mme veuve Harp née Marie Queinet, ouvrière dans la maison R. Bolloré à Stang-Wenn, en Ergué-Gabéric
  • Mme Horellou, née Anne Auffret, contremaîtresse dans la maison R. Bolloré, à Kerguel-Wenn, en Ergué-Gabéric
  • M. Jean Le Du, dit François, employé dans la maison R. Bolloré à Stang en Ergué-Armel.
  • Mme Léonus née Marie Le Moal, ouvrière dans la maison R. Bolloré à Odet, en Ergué-Gabéric.
  • Mme veuve Quéré, née Huitric, ouvrière dans la maison R. Bolloré à Menez-en-Goas, en Ergué-Gabéric
  • M. René Rannou, contremaître dans la maison R. Bolloré à Odet, en Ergué-Gabéric
  • Mme Vve Sauveur, née Marie Le Moal, ouvrier dans la maison R. Bolloré, à Pons, en Ergué-Gabéric
  • Mme Vve Trouboul, née Françoise Vétat, ouvrière dans la maison R. Bolloré, au village de Kergouen en Scaër ...

Originaux

Annotations

  1. L'Ouest-Éclair est un ancien quotidien régional français, créé par deux Bretons chrétiens d'une sensibilité républicaine et sociale, l'abbé Félix Trochu, prêtre en Ille-et-Vilaine, et Emmanuel Desgrées du Lou, natif de Vannes, commissaire de la Marine, puis avocat. Les ventes décollent après la Première Guerre mondiale et, en 1930, le patron embauche son gendre, Paul Hutin, un Lorrain de 42 ans qui deviendra son gendre. Le journal rayonnait, à ses débuts, sur cinq régions, la Bretagne, la Normandie, l'Anjou, le Maine et le Poitou, comme Journal républicain du matin. En 1940, Paul Hutin, militant antinazi comme sa femme, souhaite que L'Ouest-Eclair ne paraisse pas sous le joug allemand et s'engage dans la Résistance. L'Ouest-Éclair sera interdit à la Libération pour acte de collaboration. Paul Hutin revient à Rennes, à peine libérée, le 4 août 1944 pour créer le Ouest-France.
  2. La Dépêche de Brest est lancée le 18 novembre 1886 avec des moyens très limités et succède à l’Union Républicaine du Finistère créée 10 ans plus tôt. Quotidien, il sera même biquotidien durant des périodes d’actualité forte, comme lors de la première guerre mondiale, avec une édition du matin et une édition du soir. Installé rue Jean Macé à Brest (à l’époque rue de la rampe), à l’emplacement des locaux actuels du Télégramme, La Dépêche de Brest poursuivit son évolution jusqu’au 17 août 1944. Ce jour là, en application de la nouvelle réglementation de la Libération, les biens de la Dépêche furent mis sous séquestre. L’ensemble du matériel est alors loué au Télégramme, nouveau titre autorisé par le Comité régional de l’information.
  3. L'Union agricole et maritime, qui a d'abord été appelée L'Union agricole du Finistère est un journal local d'informations générales qui a paru à Quimperlé (Finistère) de 1884 à 1942. Il a connu des orientations éditoriales différentes, selon ses propriétaires successifs. La périodicité a aussi été variable : bi-hebdoadaire, tri-hebdomadaire et hebdomadaire. Avec pour sous-titre Organe Républicain Démocratique de la région du Nord-Ouest, le journal paraît le 1er août 1884 à l'initiative du conseiller général de Quimperlé, James Monjaret de Kerjégu, un riche propriétaire terrien et ancien diplomate résidant à Scaër.
  4. L'hebdomadaire « Le Progrès du Finistère », journal catholique de combat, est fondé en 1907 à Quimper par l'abbé François Cornou qui en assurera la direction jusqu'à sa mort en 1930. Ce dernier, qui signe tantôt de son nom F. Cornou, tantôt de son pseudonyme F. Goyen, ardent et habile polémiste, doté d'une vaste culture littéraire et scientifique, se verra aussi confier par l'évêque la « Semaine Religieuse de Quimper ».
  5. Le « Courrier du Finistère » est créé en janvier 1880 à Brest par un imprimeur Brestois, Jean-François Halégouët qui était celui de la Société anonyme de « l'Océan » qui éditait à Brest depuis 1848 le journal du même nom, et par Hippolyte Chavanon, rédacteur en chef commun des deux publications. Le but des deux organes est de concourir au rétablissement de la monarchie. Le Courrier du Finistère est, de 1880 à 1944, un journal hebdomadaire d'informations générales de la droite légitimiste alliée à l'Église catholique romaine jusqu'au ralliement de celle-ci à la République. Il est resté ensuite le principal organe de presse catholique du département, en ayant atteint un tirage remarquable de 30 000 exemplaires en 1926. Rédigé principalement en français, il fait une place remarquable à la langue bretonne, qui est, alors, pour certains ruraux, la seule langue lisible, grâce à l'enseignement du catéchisme. Ayant continué de paraître pendant l'Occupation allemande (1940-1944), Le Courrier du Finistère fait l'objet d'une interdiction de parution. Pour lui faire suite, le diocèse de Quimper a suscité la création d'un hebdomadaire au contenu unique, mais sous deux titres, le Courrier du Léon et le Progrès de Cornouaille.



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Thème de l'article : Document d'archives sur le passé d'Ergué-Gabéric. Création : Novembre023    Màj : 10.01.2024