Billet du 25.11.2023
Keristin, terres vassales des Rohan en 1681
Cette semaine la transcription d'un document de 1681 concernant le domaine noble de Keristin (orthographié parfois Kerjestin et formé du moulin du Faou et des mouvances des villages voisins), propriété d'Anne de Rohan, cette étude nous amenant à revoir notre copie sur le longévité locale de la noblesse des Rohan-Guéméné, malgré la saisie de leurs terres en 1592 pour cause d'hérésie supposée.
Comme on peut dans l'extrait de leur arbre généalogique, les ascendants en ligne directe de la princesse Anne de Rohan (1606-1685) forment 5 générations de Rohan-Guéméné, en commençant par son arrière-arrière grand-père Louis III qui, de par son mariage en 1492 avec René du Fou, a hérité du domaine de Keristin en Ergué-Gabéric. La princesse Anne s'est elle-même mariée avec son cousin germain, Rohan-Guéméné également.On dispose par ailleurs d'un document de saisie de ces terres en 1592 réputées être détenues par des « hérétiques » huguenots, on a cru pendant longtemps que le domaine était passé dans la branche des Rohan-Gié, lesquels étaient effectivement des huguenots, alors que les Rohan-Guéméné sont restés catholiques. Une explication sur la suspicion d'hérésie serait le mariage en 1561 de Louis VI avec une Rohan-Gié. Leur petite fille Anne avait par contre une réputation à la fois d'intrigante délurée et de pénitente janséniste.
Cette saisie a peut-être été une erreur d'appréciation de la part de la Saincte-Union. Elle a vraisemblablement été levée car en 1681 le domaine est toujours déclaré « tenu et possédé prochement, ligement et noblement du Roy nostre sire ». Même si elles sont incluses dans le domaine de la couronne, il s'agit de terres vassales, dont les détenteurs fonciers, en l’occurrence les Rohan, devaient acquitter envers le roi les obligations féodales.
Dans la déclaration de 1681 tous les biens sont décrits, avec pour commencer le manoir de Keristin avec son courtil (potager), son colombier et sa rabine (allée de grands arbres). Le tout, ainsi que les autres tenues à Keranroué, Kermoisan, Kerriou, Crec'hdeniel et Lezouanac'h, est loué par différents fermiers et « tenu à domaine congéable et réparable suivant l'usement du comté de Cornouaille ».
Outre les surfaces de chaque tenue, le document détaille le montant annuel des baux de ferme sous forme de mesures de céréales (froment, seigle et avoine), de quelques sols et de volailles (chapons).
L'expression « de tailles » pour désigner cette redevance ne désigne l’impôt direct impopulaire, car la Bretagne a toujours été franche et libre de taille. La « taillée » cornouaillaise n'est perçue qu'en cas de fermage.
Le moulin du domaine noble de Keristin est également détaillé : « un moulin à eau apartenant à madicte Dame nommé le Moulin du faou de Keristin a présant chomant faute de réparations ». Outre qu'il soit en arrêt (« chomant ») et qu'il rappelle le nom des nobles qui ont précédé les Rohan, il est néanmoins rappelé que les occupants du domaine de Keristin « tenus d'y faire moudre leurs grains ».
À la fin du XVIIe siècle, jusqu'à la Révolution, un rentier est tenu scrupuleusement pour la « Seigneurie de Kerjestin » afin de collationner les sommes versées annuellement par les fermiers. Par la suite, l'ensemble des terres et dépendances de Kerjestin sera intégré dans le domaine de la Légion d'honneur, avant d'être éclaté et cédé en 1807 aux convenanciers de chaque tenue.
En savoir plus : « 1681 - Dénombrement du domaine de Keristin par la princesse Anne de Rohan », Espace Archives
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