Billet du 22.03.2025

De GrandTerrier

Arrérages en livres-sols-deniers en 1787


Toujours en série B "Cours et juridictions avant 1789" des Archives départementales du Finistère : liquidations de dettes pour deux domaniers du seigneur de Lezergué.

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Les documents sont signés par Augustin Le Goazre de Kervélégan, sénéchal de Quimper et premier magistrat de Cornouaille, qui deviendra avocat pendant la Révolution, et député du Tiers Etat à l'Assemblée constituante.

Nous sommes à la veille de la révolution de 1789, et on parle encore de « rentes domainialles », mais pour autant on ne s'attarde pas sur les natures féodales des contrats de fermage. La seule précision est que la rente se paie en boisseaux de grains (froment, seigle, blé noir, avoine), chapons (jeune coq chatré) et poulets, sans oublier une partie en argent et les domaniers de Kergaradec et Lezouanac'h doivent la régler à leur seigneur local avec une échéance annuelle à la Saint-Michel.

Représenté par son procureur, le demandeur de la comparution pour arrérages (montant échu de rente) devant le sénéchal est François-Louis de La Marche « chef de nom et d'armes de Lamarche chevallier seigneur de Kerfors, Lezergué et autres lieux ». Héritier d'un domaine noble constituée de nombreuses terres et mouvances dont Kergaradec et Lezouanac'h, il réside dans son manoir de Lezergué qu'il vient de faire reconstruire. En août 1791, pour éviter les tracasseries révolutionnaires, il devra s'exiler sur l'île de Jersey où il décédera en 1794.

Le 1er défaillant de paiement de sa rente est Yves Hémon, cultivateur à Kergaradec, né en 1750 et toujours présent sur les lieux lors du recensement de la population en 1790. Le second, cultivateur à Lezouanac'h, est orthographié Sébastien Le Mao sur l'acte de 1787, mais il est vraisemblable que son vrai patronyme soit Le Mahé comme cela est indiqué sur le registre de baptême en 1749 et sur le recensement de 1790.

Au vu de la situation d'impayés depuis 4 années et que les défaillants ne se sont pas présentés à la comparution, le sénéchal décrète qu'il seront condamnés à payer une somme totale en argent, la procédure de liquidation consistant littéralement à déterminer le montant exact de la dette.

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La somme en question est obtenue par valorisation de chaque boisseau de grains du annuellement. On notera que les prix du boisseau varient d'année en année (hormis l'avoine dont le cours est plus stable), celui de froment ou de seigle doublant presque en 1785 par rapport à l'année précédente.

Chaque somme indiquée est en livres et sols, deniers, la livre valant 20 sols ou 240 deniers, et le sou 12 deniers. On remarquera la technique de totalisation en ramenant tout en deniers, comme indiqué dans le 2e document : un sous-total indicatif de 1783 deniers, traduits en 99 livres 7 sols 8 deniers, obtenus par division par 240 et 20.

Chaque défaillant se voit in fine attribuer respectivement un arriéré total de 245 et 243 livres en unités de compte. Quant aux unités de règlement, c'est-à-dire les pièces de monnaie physiques circulant de main en main pour le règlement des transactions, elles sont bien sûr différentes : ainsi la pièce en image ci-dessus est un 1/5 d'écu, l'écu valant 3 livres.

Mais cette complexité va bientôt disparaître avec l'évènement de la Révolution française.


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En savoir plus : « 1787 - Liquidation de rentes domaniales au profit du seigneur de La Marche », espace "Fonds d'Archives".




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