Billet du 22.02.2025
Internement d'une veuve indigente à l'asile de Quimper en 1822
Cette semaine on a révisé notre inventaire des documents de la sous-série 2O "administration communale" des Archives départementales du Finistère, une sous-série qui a fait l'objet d'un profond remaniement. Les articles du grandterrier concernés ont été mis-à-jour selon le nouveau plan de classement. Et c'est l'occasion d'ajouter la pépite inédite "2 O 794" qui était passée inaperçue dans l'ancienne liasse "1 O 70".
Il s'agit plus précisément de 2 lettres du préfet Louis Jules Auguste des Rotours aux maires d'Ergué-Gabéric et de Quimper au sujet de l'admission de Marie Anne Guiguinou, veuve Tréb(d)ern à l'hospice de Quimper. Documents conservée aux Archives départementales du Finistère (2 O 794, anciennement 1 O 70). Illustrations : 4 photographies du chanoine Jean-Marie Abgrall (1846-1926) conservées et publiés par les Médiathèques de Quimper Bretagne Occidentale (site https://www.bretania.bzh).Cela se passe en 1822, avant l'ouverture en 1826 de l'asile Saint-Athanase pour les hommes du département (les femmes étant internées à Morlaix). Avant cette extension, l'hospice civil de Quimper n'est ouvert en principe qu'aux vieillards et indigents de la ville, comme l'indique le préfet : « Bien que cet établissement regorge de malheureux de toute espèce qui appartiennent de droit à la ville, j'ai prié néanmoins l'engagement d'y faire admettre l'infortunée Trédern ».
Cette veuve indigente, née Guénéou ou Guiguinou, est vraisemblablement née après 1770 :
- Sur son acte de mariage en 1792 à St-Evarzec avec Alain Trébern (orthographié Trédern dans les courriers du préfet), elle est mineure, domiciliée à St-Evarzec et son nom est orthographié Gueneou. Sur l'acte de décès en 1834 son nom de jeune fille est Guiguinou.
- Son mari Alain Trébern décède en 1804 à St-Evarzec, et c'est son frère André qui déclare le décès. Ce dernier, cultivateur, est marié la gabéricoise Marie-Anne Barré de Kermoysan, et c'est peut-être par cette alliance qu'on constate la domiciliation de Marie-Anne Guiguinou, veuve Trébern, à Ergué-Gabéric.
- Son état de dénuement en 1822 alors qu'elle a à peine 50 ans est sans appel : « l'état absolu de dénuement dans lequel est réduit la Veuve Trédern » ; « une femme qui se trouve dans l'état le plus absolu d'indigence »
- La demande d'hospitalisation est à la fois initiée par le curé desservant de la paroisse Yves Le Roux (le recteur nouvellement nommé), et par le maire Hervé Lozac'h de Squividan.
- Le préfet insiste sur l'urgence de l'internement de la veuve « qui n'a plus d'autre asile que l'asile des malheureux », c'est-à-dire l'hospice des indigents et vieillards démunis. Certes le maire d'Ergué-Gabéric et le recteur ont fait une demande expresse au maire de Quimper, mais l'intervention du préfet est requise pour que l'internement puisse être acté.
- Le prix fixé forfaitaire « pour la nourriture et les soins » que doit payer la caisse communale d'Ergué-Gabéric est de 50 centimes par jour. Cette somme doit correspondre à la moitié environ du tarif de 4e classe que les pensionnés de l'asile départemental Saint-Athanase devront payer plus tard, soit 1,20 francs en 1878 selon l'étude « Aliénés » d'Anatole Le Bras.
- En 1834, 12 ans après son admission à « l'asile des malheureux » : Acte de décès de « Marie Anne Guiguinou, veuve d'Alain Trébern, décédée hier, à six heures du soir, à l'hospice civil de Quimper à l'âge de 64 ans, native de Saint-Evarzec, sur la déclaration à nous faite de Guy Marie Duboden, commis aux entrées ».

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