ROBB Graham - Une histoire buissonnière de la France
Titre : | Une histoire buissonnière de la France | ||
Auteur : | ROBB Graham | Type : | Livre/Brochure |
Edition : | Flammarion | Note : | Traduction d'Isabelle Dominique Taudière. Titre original : « The Discovery of France ». |
Impression : | Nord Compo multimédia | Année : | 2011 |
Pages : | 576 | Référence : | ISBN 2-081237896 |
A propos du dernier extrait ci-contre (page 145), un billet en anglais de l’éditorialiste Natalie Bennet :
« Robb reports how women in many areas were subject to horrible abuse and treated as little more than working animals, but he also makes it clear that they didn’t always accept this, and that female solidarity could go to considerable lengths. He quotes the Breton peasant Deguignet on a custom in Brittany (an area known for its strong patriarchy) about a game played by women at midday, when the men were asleep. Four or five women would find a man on his own, pin him down, and stuff his pants with mid or cow dung. Furthermore, if the game got rougher, “the woman left free would split the end of a thick stick, then with her two hands she would pry it apart the way you open a trap, and fit it onto the organis generationis ex pace par hominis… It was done in full daylight and right out in the fields in front of everyone, in front of gangs of children clapping and screaming with laughter ».
Read more: http://blogcritics.org/books/article/book-review-the-discovery-of-france/page-4/#ixzz1kPhHErY5Depuis des années, Graham Robb, éminent historien britannique, sillonne la France à vélo, à raison de deux séjours par an. Combinée à une solide érudition universitaire, cette connaissance du terrain lui permet de retracer une histoire inédite et vraie de la « France profonde » depuis la Révolution jusque la première guerre mondiale.
A la fin de cette somme, dans l'index géographique, la commune d'Ergué-Gabéric a l'honneur d'y figurer. Ceci par le truchement de Jean-Marie Déguignet dont la destinée est citée abondamment sur plusieurs pages et sert d'exemple pour l'évolution rurale de la fin du 19e siècle (pages 118-120), pour sa description du métier de mendiant (page 136) et pour la place des femmes dans les campagnes (page 145).
Pages 118-119 :
Même pour les individus entreprenants et intelligents qui parvenaient à grappiller des bribes d'instruction et avaient vu le jour dans le climat plus dynamique du XIXe siècle, la vie restait un parcours périlleux et tortueux, pareil à la spirale d'un jeu de l'oie semée d'embûches. Le paysan breton Jean-Marie Déguignet (1834-1905) décida d'écrire ses mémoires car il n'avait jamais rien lu, ailleurs que dans des romans, sur un personnage qui lui ressemble. À la bibliothèque municipale de Quimper, il avait entrevu un fragment de la vie des Français brillamment éclairé par une poignée d'écrivains à l'égo démesuré, tandis que la grande masse de l'humanité était livrée aux ténèbres.
Page 120 :
Ce paysan breton instruit, férocement anticlérical et passionné par l'innovation agricole n'était certes pas tout à fait représentatif de sa classe, mais le monde qui eut raison de ses énergies était le lot de milliers de gens : un monde marqué par la précarité d'une fortune durement gagnée et la fragilité de liens familiaux dans l'adversité. L'édition moderne de ses mémoires fait vibrer la corde d'une vague nostalgie rustique et suggère que le livre aurait aussi bien s'intituler « Le Déclin de la France rurale ». L'auteur est ici présenté comme un témoin du « début de la désagrégation de la société bretonne traditionnelle ». Or ses mémoires racontent exactement le contraire.
Page 136 :
Comme l'apprit le paysan breton Déguignet aux dépens des âmes charitables, la mendicité était un métier à part entière. Les mendiantes vendaient leur silence aux gens respectables en les harcelant en pleine rue de commentaires obscènes et ragot compromettants. Elles empruntaient des enfants malades ou difformes, se confectionnaient des blessures d'un réalisme criard ... Les mendiants ne méritaient pas leur surnom de « rois fainéants » car, comme le souligne Déguignet dans ses mémoires, ce n'était pas une mince affaire que de se cacher derrière une haie pour se fabriquer un moignon ou « une jambe horriblement enflée et couverte de pourriture ».
Page 145 :
Jean-Marie Déguignet, le paysan bas-breton, avait été témoin aux quatre coins de la Bretagne patriarcale de scènes qui semblent bien indiquer que toutes les femmes n'étaient ni soumises ni maltraitées. À l'époque de l'année où les « meilleurs gars » travaillaient dans la lande, certaines se livraient à un jeu appeler « mettre le kaoc'h et la goaskerez aux grands gars ». À midi, quand les hommes dormaient, quatre ou cinq coquines en repéraient un isolé, l'immobilisaient à terre et lui emplissaient le pantalon de boue ou de bouse de vache :
« Cela s'appelait lakad ar kaoc'h et ne faisait pas grand-mal au patient, mais l'autre jeu était pire ; ici, la femme restée libre préparait un gros bâton fendu, puis dans cette fente, elle introduisait les « organis generationis ex pace per hominis ». Cela s'appelait lakad ar woaskerez. Et cela se pratiquait en plein jour et en plein champ devant tout le monde, devant des bandes d'enfants qui applaudissaient et riaient aux éclats ».
Si les conventions avaient permis aux peintres de représenter une volée de femmes s'abattant sur leur victime pour lui « mettre la pression », les musées de la vie quotidienne seraient peut-être moins mornes.
Autre(s) lecture(s) : « Jean-Marie Déguignet et le sexe » ¤