Les souvenirs de Jean Thomas à l'école primaire du bourg

De GrandTerrier

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Entretien avec Jean Thomas, né le 17.05.1929, à Ergué-Gabéric, et entré à l'école primaire du bourg en septembre 1934.

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Article publié sur le site pédagogique de l'école : http://ecole.bourg.ergue.pagesperso-orange.fr

Autres lectures : « Le bourg d'Ergué dans les années 1930 par Jean Thomas, Keleier Arkae 2016 » ¤ « 1946-1952 - Ecole communale des garçons au bourg » ¤ « 1883-1885 - Construction de l'école des garçons au Bourg » ¤ « 1807-1849 - Les projets initiaux d'école communale au bourg » ¤ « 1849-1856 Ouverture de la première maison d'école communale au Bourg » ¤ 

Compte-rendu de l'entretien

Entrée à l'école

Jean est allé à l'école en septembre 1934, un peu en avance par rapport aux autres enfants, du fait qu'il habitait tout près de l'école. En effet ses parents avaient acheté un commerce attenant à l'école, rue du Douric [1] : épicerie, café, menuiserie ébénisterie, salle de danse.

Il parlait breton à son arrivée à l'école, mais était aussi familiarisé avec le français car on parlait autant français que breton alors dans le bourg. Le breton commençait déjà à être perçu comme une "langue de vieux ". Dans la petite classe, on avait le droit de parler breton. Ce n'est qu'à partir du CE2 qu'on risquait la "vache ". Dans ces années-là, à l'école du bourg, c'était un galet.

Certains élèves faisaient 3 à 4 km pour arriver à l'école. En guise de manteau de pluie, ils avaient des sacs en chanvre à patates.

Pour son entrée à l'école, sa mère lui avait tricoté un beau chandail en laine rouge, chinée de fil bleu. Plus grand, il a porté :

- En hiver: la blouse, les sabots de bois, les pantalons.

- En été : la blouse, les sandales, la culotte courte.

Le matériel

Le matériel d'écolier tenait dans une musette. Le premier livre de lecture était un abécédaire; ensuite "Pierrot et Pierrette ", "Jeannot et Jeannette ". L'école fournissait l'ensemble du matériel, gratuitement.

Dans la classe il y avait un poêle à charbon, 2 tableaux noirs. Aux murs, il y avait les fables de la Fontaine illustrées. Horaires : 9h- 12h et 14h- 17h. Au coup de sifflet du maître, les élèves se mettent en rang. Le maître procède à la revue des mains et des oreilles, le matin et l'après-midi. Puis les élèves entrent en classe. Ils rejoignent leur place, sur des tablées de 5 ou 6. La journée commençait par la leçon de morale. Le maître racontait une petite histoire. Il inscrivait la date au tableau et la leçon de morale retirée de la petite histoire qu'il venait de raconter. Ensuite, l'ordre des cours variait.

La journée d'école

De 10h30 à 11h, c'était la récréation. Les garçons jouaient:

- au « drapeau » : 2 équipes. Le but est de prendre une casquette ou autre objet à l'équipe adverse.

- aux billes « poc à poc » c'est à dire, laisser tomber verticalement la bille, avec au sol 5 trous.

- à la « barre » sorte de gendarmes et voleurs.

- à la marelle

Pendant la guerre, il y a eu les toupies, apportées par les réfugiés.

Organisation de la classe

Il y avait environ trente élèves dans chaque classe. La petite classe correspondait au CP, CE1, CE2, la grande classe: CM1 et CM2. Une troisième a été ouverte à partir de la guerre où l'effectif a augmenté du fait de l'arrivée de petits réfugiés.

Les surnoms

Les surnoms dont Jean Thomas se rappelle sont : Le sien, " Jean Bihan ", petit Jean; Pich pleon : queue en plume; Gaouac'h koat: chèvre en bois; "Gueguen " à un petit garçon qui admirait un geai par la fenêtre et à qui on avait demandé ce qu'il regardait. Il a répondu en disant le nom de l'oiseau en breton, c'est à dire, " gueguen ". Jean faisait partie d'une bande de copains surnommés "c'has ar vorc'h ", les chiens du bourg, beaucoup plus terribles que les garçons de la campagne, parce que toujours ensemble.

Cantine

Il n'y avait pas de cantine. Les enfants déposaient leur pain dans un bistrot précis chaque matin avant d'arriver à l'école. Le bistrot avec lequel s'étaient arrangés leurs parents. A midi, ils revenaient et on leur trempait leur soupe. Les enfants les plus favorisés prenaient leur repas à la table de la famille qui tenait le bistrot. Les autres, la plupart de temps, avalaient leur repas en 5 mn et repartaient jouer. Ils profitaient de l'heure de midi pour aller chasser. Ils partageaient leur chasse si elle avait été fructueuse. Ils allaient aussi au bord du Jet et du Douric. Entre 1946 et 1948, Mme Thomas, la mère de Jean a mis à disposition sa salle de danse pour servir de cantine aux garçons et aux filles des écoles publiques du bourg. Mme THOMAS faisait la cuisine ragoût, pâtes à la confiture, saucisses grillées-purée. La cantine était approvisionnée en partie par les dons des parents (pommes de terres notamment). Ils payaient quand même une partie à l'école. La surveillance était assurée par les instituteurs. Puis la cantine s'est tenue sous la moitié de l'ancien préau jusqu'en 1965.

Le jour de congé

Le jour de congé était le jeudi. Il aidait le plus souvent ses parents, son père à l'atelier ou sa mère au commerce. Mais il avait aussi des quartiers libres, où avec ses copains du bourg, ils allaient chercher des nids, chasser les écureuils au bois de sapins, appelé "bois du maire" à Kerellou, jouer au foot sur la place de l'école, ou sur la route, alors peu fréquentée devant le cimetière, se baigner dans le Jet, jouer dans l'if près de l'église, courir le long du mur du cimetière (encore situé en partie autour de l'église) sans poser pied à terre, jouer au foot avec des crânes pris dans l'ossuaire ou faire des batailles avec des tibias. On était obligé d'aller au catéchisme entre 12 et 14h un jour de la semaine.

Les vacances

Jean travaillait à l'atelier de menuiserie-ébénisterie avec son père ou à la campagne à faire la moisson, ramasser les patates, les petits pois. C'étaient des travaux que son père devait aux paysans du coin pour services rendus, notamment charroyage de matériel (bois...), sauf la récolte des petits pois qui permettait à Jean de se faire un peu d'argent de poche.

Le certificat d'études

Jean Thomas a présenté le certificat d'études la même année que le concours des bourses pour l'entrée en 6e M. Autret l'a préparé au certificat d'études, juste avant d'être appelé à la guerre et d'être remplacé par Mlle Morvan. M. Autret gardait les candidats au certificat le soir après la classe pour les faire travailler. Jean a obtenu son certificat. Il a passé les épreuves A Jules Ferry, à Quimper. Il s'y est rendu en vélo, en costume. Le midi, il a mangé dans une crêperie à Quimper. L'épreuve de dessin a fait baisser sa moyenne, sinon il aurait été le meilleur élève du canton. Il n'a pas reçu de félicitations particulières. Selon les résultats la caisse d'épargne offrait en récompense, un livret de caisse d'épargne. Jean a obtenu l'ouverture de ce livret. Ailleurs, les horlogers pouvaient offrir une montre aux candidats qui avaient remporté un succès aux épreuves. Jean a donc quitté l'école du bourg à 12 ans.

Sa famille était fière de lui. Elle aurait aimé qu'il aille au collège de Concarneau comme son oncle Hervé Bénéat, devenu instituteur (il était stagiaire de l'école Normale quand il a été arrêté par les Allemands). Par contre, il n'a pas réussi le concours les bourses la première année dans la dictée, il ne connaissait pas "la poudre de riz ", et le problème de l'époque, sur le thème de tranchées à creuser, s'il émanait du contexte de l'époque, lui a posé des difficultés. Mais la deuxième année, il l'a obtenu haut la main: il a eu les bourses entière c'est à dire toute sa scolarité secondaire a pu être payée grâce aux bourses. Jean est entré en 6ème au lycée de la Tour d'Auvergne. Il a eu son bac. Il pensait devenir ingénieur chîmiste. Il s'était inscrit à la faculté de chimie de Caen. Mais pour lors, il n'avait plus de ressources pour continuer ses études, donc il s'est tourné vers le métier d'instituteur.

Annotations

  1. Le « Douric » (de « dour » signifiant "eau" en breton), s'appelait autrefois « Douric Piriou ». C'est un petit ruisseau qui prend sa source du côté de Lézergué, passe au bas de la colline au nord de l'école communale des garçons (prairies de la ferme Leroux), coupe la descente en bas de la route devant l'école, passe dans les prairies de Pennarun, traverse la route Quimper/Elliant au bas de la cote de Pennarun avant de se jeter dans le jet. On peut penser que la mention "Piriou" venait du nom du propriétaire d'une des prairies traversées par le ruisseau. Quant à l’appellation d'école du Douric, les anciens de 1946-47 sont un peu critiques : « L'école n'a jamais eu un autre nom que celui d'école des garçons ; comme elle était seule, ça suffisait, et donc on le l'appelait pas l'école de la rue du Douric »



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Thème de l'article : Mémoires de nos anciens gabéricois. Création : Août 2014    Màj : 19.09.2023