Billet du 23.12.2023
Ravages de l'ivrognerie en 1839
Un billet à la veille des fêtes de Noël prônant la tempérance et la sobriété, à l'instar de cet article de 1839 appelant à lutter contre les effets désastreux de l'alcool de contrebande dans une certain commune de basse-Bretagne.
Cet entrefilet est paru dans l'édition du jeudi 21.12.1839 du « Quimpérois ». Ce journal, le tout premier hebdomadaire local lancé en 1838, est financé par les publicités et les annonces légales et couvre à la fois les sujets économiques et sociétaux, et même intellectuels du fait de la passion de son rédacteur Armand Duchatellier pour la littérature.Le combat contre l'alcoolisme, « l'ivrognerie » disait-on à l'époque, fait aussi partie de la ligne éditoriale du journal, et cet article est un plaidoyer politique pour la défense des ivrognes qui sont les victimes des débitants de boissons : « Est-ce que le gouvernement ne pourrait pas un peu les protéger ? ».
En juillet 1844, on y trouve encore la même invective à la une du journal : « En présence de l'horrible sophistication dont s'enivrent les bretons, ... il est de la plus grande urgence de chercher, de solliciter ce remède de la part du gouvernement. ». Le remède en question est essentiellement des mesures de prohibition de l'eau-de-vie frelatée.
En décembre 1839, c'est un triple fait-divers gabéricois qui sert de support au message politique : « La commune d’Ergué-Gabéric, voisine de celle de Quimper, vient, dans l’espace de dix jours, de perdre deux de ses habitants par l’effet d’une complète ivresse, et d’en voir un troisième arraché à une mort imminente, déterminée par le même excès ».
« L’un, le premier, a succombé dans le cabaret même où il s’était enivré, et sans quitter le banc et la table où on l’avait repu de boissons alcooliques ; le second, saisi de froid sur le bord de la route, où il cuvait son vin, y a succombé. »
« Quant au troisième, la fortune et le hasard l’ont fait recueillir, par des personnes bienveillantes, sur la voie publique, quand il allait également succomber ; et ce n’est qu’après l’avoir couvert d’une épaisse couche de fumier qu’on a pu le rappeler à la vie. »
On ne connaît pas l'identité des 3 ivrognes. Même en consultant les avis de décès de cette fin d'année 1839, le mystère reste entier, car les deux derniers hommes décédés ont respectivement 15 jours et 8 ans, et le précédent est un Hascoët Anonyme sans âge décédé fin octobre.
Le prêtre qui monte en chaire pour protester sur les ravages de l'alcool est vraisemblablement le recteur Yves Le Roux (ou alors son vicaire Jean-François Plantec) : « Honneur encore ici, honneur au prêtre que nous savons être intervenu dans ces malheureuses affaires, et qui, poussé par une sainte indignation, a monté en chaire pour faire entendre, à ses paroissiens, le cri de son cœur déchiré à la vue de tant d’infamie. Comme nous, si nous sommes bien informés, il a crié aussi au poison et à l’assassinat, et, prenant la chose de toute sa hauteur, il a dit, avec raison, que tuer ainsi le corps et l’âme d’un chrétien était un des plus grands crimes qui pût être commis ... »
En savoir plus : « Deux morts et un rescapé suite à ivresses prononcées, Le Quimpérois 1839 », Espace Journaux
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