Billet du 02.12.2023
Les hésitations d'un vicaire constitutionnel
Michel Huitric a la particularité d'être né à Ergué-Gabéric, d'y avoir été nommé prêtre en pleine tourmente révolutionnaire et d'avoir prêté trois serments, l'un en allégeance au pape et à la royauté, et les deux autres pour la Constitution civile du clergé et les valeurs républicaines.
Michel Huitric est né le 26.02.1750 dans le village de Guillybras en Ergué-Gabéric. Dans le recensement de 1790 on le trouve domicilié à Rubernard, alors que sa sœur Marie-Anne, veuve Le Pouppon, est journalière à Guillybras.
Il est nommé comme vicaire en 1790, assistant le nouveau recteur desservant constitutionnel et remplaçant du recteur insermenté Alain Dumoulin, ce dernier ayant dû s'exiler. Tous deux, Huitric et Yven, prêtent le serment à la constitution civile du clergé : « Je jure de veiller avec soin sur les fidèles de la paroisse qui m'est confiée, d'être fidèle à la Nation, à la Loi, au Roi et de maintenir de tout mon pouvoir la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le Roi. »
Pendant l'année 1790 et jusqu'au 1er mai 1791 le recteur réfractaire garde la main sur la rédaction et la signature des actes de baptêmes, mariages et sépultures. A partir du 6 mai, l'équipe constitutionnelle prend le relais, essentiellement le nouveau desservant et aussi le vicaire Huitric à plusieurs occasions :
Dans une lettre du 28 fructidor de l'an 3, les représentants du département préviennent le directoire du district de Quimper que la veille le 27, à savoir le dimanche 13 septembre 1795 sur le calendrier grégorien, il y a eu « une grande affluence de peuple à la chapelle de Kerdévot commune d'Ergué-Gabéric et que les ministres du culte y ont aux mépris des lois fait des actes extérieurs de religion », en l’occurrence un pardon avec procession.
Le directoire quimpérois est plus compréhensif : « si les lois relatives à l'exercice du culte ont été violées dans la commune d'Ergué Gabéric ce n'a été qu'à l'instigation de ses ministres, et qu'aucun trouble ne s'est élevé au milieu des citoyens paisiblement réunis à Kerdévot. »
L'avis du district local est que « les ministres qui ont célébré leur culte dans la chapelle de Kerdévot le 27 fructidor dernier soient dénoncés au juge de paix de l'arrondissement pour être procédé contre eux en conformité de la loi ».
Il s'agit donc de juger l'incartade des membres du clergé gabéricois qui n'a pas respecté l'interdiction des actes religieux en dehors des églises. Pourtant à cette date en 1795, le clergé local a prêté allégeance et la contestation précédente du recteur Dumoulin n'est plus d'actualité.
Mais sans doute que le vicaire Michel Tanguy a des regrets, car il se rétracte lors de ces cérémonies interdites à Kerdévot, cette information étant confirmée par les mémorialistes Jean-Louis Le Floc'h et Daniel Bernard. Il prête donc un serment, cette fois en allégeance au pape : « Je rétracte le serment d'adhésion que j'ai prêté à la Constitution civile du clergé ... »
Six ans plus tard, en 1801, alors qu'il vient d'être affecté à la paroisse de Plonéour, il prête un 3e serment plus proche de celui de 1790, à savoir le serment de la haine exigé par les instances nationales du Directoire : « Je jure haine à la royauté. Je jure fidélité à la république et à la constitution de l'an III. ».
En savoir plus : « Michel Huitric, vicaire à EG (1790-1791, 1795, 1801-1804) », Espace Biographies
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