Billet du 14.10.2023
Les danses Kof-ha-kof dans les années 1930-40
Cette semaine le dernier livre de Pierrich Chuto consacré à Monseigneur Duparc, évêque emblématique en lutte contre les danses sataniques, avec l'aide du clergé de son diocèse, disponible depuis le 11 octobre 2023 à la librairie Ravy, au centre culturel de Quimper ou sur le site de l'auteur : http://www.chuto.fr/ . La semaine prochaine sortie du bulletin trimestriel Kannadig.
En mars 1932 l'évêque Monseigneur Duparc requiert de ses prêtres la lecture en chaire de ce mandement : « Depuis quelques années, les salles de danse se sont multipliées dans toutes les parties du diocèse et sont devenues des occasions de désordres abominables, de véritables écoles de corruption ... Il est urgent de prendre quelques mesures pour enrayer ce mal qui menace de se généraliser. »
Le livre de Pierrick Chuto est un collectage édifiant de toutes les actions relayées pour combattre « les danses Kof ha Kof (ventre à ventre) diaboliques et inventées par Satan ». Il n'est pas une paroisse finistérienne de l'évêché de Quimper et Léon qui ne soit citée pour illustrer les mesures ecclésiastiques et les réactions anti-catholiques générées.
Les magnifiques illustrations pleines-pages de Jean-Marie Misslen, empreintes de drôlerie et de poésie, apportent un plus à la compréhension d'une époque révolue.
Dans la fiche bibliographique en ligne, on trouvera quelques extraits relatant des anecdotes gabéricoises.

Dossier spécial sur les engagements écrites des tenanciers gabéricois et du règlement punitif des recteurs Pennec et Guéguen : dans le contexte décrit par Pierrick Chuto dans son livre, Louis Pennec rédige cet étonnant règlement manuscrit sanctionnant tous mariés qui feraient leur repas de noces dans un établissement récalcitrant en n'autorisant qu'une cérémonie religieuse de troisième ordre « sans cloches et sans solennité ».
Les cinq tenanciers gabéricois dont on a conservé l'engagement sont Le Berre-Rannou (au bourg), Helaouët Michel (à la Croix-Blanche), Le Meur (St-Guénolé), Thomas (Bourg), Balès (Bourg) et Quéré (Lestonan).
Exemples de billets : « Nous prenons l'engagement d'interdire chez nous toutes danses de dimanche, toutes danses de nuit, et toutes danses de circonstances, excepté les danses de noce jusqu'à l'Angélus du soir » (Le Berre) ; « Je m'engage à ne plus donné bal le dimanche » (Le Meur).
Le recteur Gustave Guéguen écrit dans son journal son énervement devant l’insoumission de la salle Balès : « 11 avril 1944. Profite de l'absence de François Balès dans le maquis pour obtenir de ses sœurs leur soumission et lever l'interdit pesant sur leur salle. L'aînée a bien volontiers accédé au désir du Recteur, mais le frère consulté a refusé absolument de se soumettre. Donc du fait de cet entêtement inexplicable pas de changement possible de la part du clergé désireux de faire la paix. »
Catherine Balès prend la plume le 12 juin de cette même année 1944 pour exprimer leur ralliement familial : « Connaissant les sentiments d'admiration respectueuse de mon frère à votre égard, à ma majorité, je m'empresse de déférer à vos désirs en vous assurant que dans ma maison on ne fera de bals et on ne donnera de séances cinématographiques que rarement et pour des circonstances bien déterminées. » Avec confirmation le 14 octobre 1945 après le décès du frère résistant : « Nous soussignés certifions que désormais, en dehors des bals de noces, nous ne donnerons dans le cours de l'année, que de rares bals dans notre salle. »
Le dernier établissement récalcitrant, la salle Quéré de Lestonan, capitule en février 1946 : « Je soussigné m'engage à restreindre le nombre des bals à donner dans ma salle ... de telle façon que ma maison ne puisse être considérée comme faisant opposition systématique au clergé d'Ergué-Gabéric. »

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