Laouic Saliou (1909-1990) sculpteur autodidacte, Ouest-France 1986 (LQ)

De GrandTerrier

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« Sculpteur depuis 62 ans - Laouic Saliou sculpteur et comique troupier »

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Les 31 janvier et 1er février 1986, paraissaient dans les colonnes du Ouest-France deux articles de Laurent Quevilly sur la vie bien remplie du sculpteur Laoic Saliou de Bigoudic.

Autres lectures : « La fontaine de Saint-Jacques, Ouest-France 2009 » ¤ « Bénédiction de la statue St-Jacques à St-André, Progrès du Finistère 1942 » ¤ « La statue de saint André, oeuvre d'un artiste gabéricois et objet inscrit aux M.H. » ¤ 

Coupures et photos

Transcription

Comique troupier

Chaleureux, Laouic Saliou est à l'image du bois qu'il travaille encore amoureusement. Soixante deux ans après son entrée en apprentissage, l'homme n'a rien perdu de son coup de ciseau. Ses statues, nombre de chapelles en sont la demeure dans la région. On lui doit aussi de grands éclats de rire datant du temps où il brûlait les planches. Une vraie vie d'artiste qu'il évoque avec nous ...

« Moi, je suis né à Ergué en 1909. Le père, ébéniste à Briec, était venu comme menuisier à la papeterie. Quant à ma mère, elle travaillait au château. » Les Saliou sont d'une famille liée au bois (les meubles du même nom en sont une branche). En ce début du siècle, ils habitaient une maison ouvrière près du canal. Il y aura neuf enfants.

Un air de Fernandel

« Tout gosse, je suis allé faire du foot chez les Paotred Dispount Mais surtout du théâtre... Ça a duré 20 ans ! », Excellent comédien, Laouic a le physique de l'emploi. Son sourire évoque celui de Fernandel. Alors on le retrouve le plus souvent dans des comédies plutôt que des rôles tragiques. Pourtant, il se sent aussi à l'aise dans l'un et l'autre genre. Le lot de tous les comiques catalogués comme tels. « Sous la direction de Fanch Nédellec, le directeur de l'école privée, nous étions une vingtaine d'acteurs. La troupe du patro avait alors un énorme succès dans la région. On allait jouer partout, à Briec, à Elliant ... Les salles étaient archicombles et j'ai vu des spectateurs assis sur le devant de la scène. »

En dehors du vaudeville, Laouic donne aussi dans le comique troupier. Avec Yvon Gestin, un chauffeur de l'usine, ancien conseiller municipal, il pousse la chansonnette pendant les changements de décors, mais aussi dans les noces et les banquets. « On reprenait le répertoire de Bach et Laverne - deux comiques troupiers en vogue à l'époque. Et puis, j'en connaissais des vertes et des pas mûres ! ». La rigolade durera jusqu'à 1947. Aujourd'hui encore, beaucoup de Gabéricois se souviennent de cette époque.

Le C.A.P. à plus de 50 ans

_ « Je suis entré comme apprenti-sculpteur chez Autrou à Quimper en 1924, à l'âge de 15 ans, après mon certificat d'études. On y fabriquait des meubles de style. Deux fois par semaine, Je suivais des cours de dessin et de modelage au gymnase. Après 3 années d'apprentissage, je suis allé travailler chez un certain Fanch Le Rest, avant de me mettre à mon compte en 1929. Son atelier est alors situé à Keranna ».

_ « Au départ, je ne faisais que de la sculpture de meubles pour les ébénistes du coin. Puis, j'ai acheté des vieilles machines pour fabriquer des meubles. Mon CAP, je ne l'ai eu que 40 ans après l'apprentissage ».

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_ « Quand la Chambre de Métiers s'est constituée, on a recensé les artisans qui ont reçu un formulaire à remplir. Seule condition : avoir son certificat d'études ».

Le plus drôle, c'est que Laouic Sallou a reçu un CAP de menuiserie en bâtiment, alors qu'il n'a jamais mis les pieds sur un chantier.

_ « Ma première statue, je l'ai faite en 1930. C'était une Sainte Anne pour l'église paroissiale, elle a été peinte par Jos Quéré ».

La même année, Laouic réalise un St Joachim et St André et participe dès lors à la restauration de nombreuses chapelles de la région. Il a même travaillé sur les sablières de St-Guénolé.

ND et souvenirs bretons

En 1946, Les Saliou emménageront rue du Bigoudic :

_« Mathias Riou a bâti ma maison. Pour lui, c'était la toute première ».

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Et c'est là que Laouic va produire ses chefs-d'œuvre: en chêne, en tilleul, en buis... Sa fierté: une réplique en acacia de Notre Dame de Kerdévot avec l'enfant Jésus et sept angelots (photo).

_ « Ça m'a pris 5 mois de travail, et comme j'étais débordé, le recteur venait m'enguirlander pour que j'aille plus vite ».

Maintenant, une telle inspiration religieuses doit forcément témoigner d'un profond mysticisme ?.

_ « Pas du tout ! D'abord, j'ai fait des statuettes à caractère profane comme cette Vénus nue et enceinte ! ».

Éclat de rire :

_ « Le docteur m'a dit qu'elle portait un peu bas. Et puis, si Staline m'avait commandé un buste, eh bien, je le lui aurais fait comme les autres ! ... ».

_ « J'ai été aussi parmi les premiers à faire des souvenirs bretons: des profils sur des assiettes en bois, des bonbonnières, des blasons. Au début on n'était que trois en Bretagne à travailler pour les bazars et les pâtisseries. C'est pas comme maintenant ! »

Il a pris sa « retraite » en 1975, mais il a continué à retaper des meubles et bricoler dans son atelier.

_ « Aujourd'hui, il n'y a plus de sculpteurs comme dans le temps. A la machine, c'est trop bien fait et pour qu'une sculpture ait du cachet, on doit voir les traces de coups ».

Voilà un homme, un artiste qui a eu une vie bien remplie !

Détail des sablières de St-Guénolé

Annotations

  1. Collection particulière. Sculptée en 1985, année du cinq-centenaire de Landévennec



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Thème de l'article : Mémoires de nos anciens gabéricois. Création : 2006    Màj : 21.10.2023