Le gage d'amour du film "Les Naufrageurs", Détective 1958

Pour rendre compte de la sortie du film des Naufrageurs, le journal national Détective détaille les relations amoureuses entre le producteur Gwenn-Aël Bollré et son épouse actrice.

Un article rédigé par la journaliste et romancière Hélène Mornay et un reportage photo de Jean-Gabriel Seruzier.
Autres lectures : « Gwenn-Aël Bolloré (1925-2001), écrivain-poète et PDG » ¤ « BRABANT Charles - Le film Les Naufrageurs » ¤ « 1958 - Première mondiale du film Les Naufrageurs à Quimper » ¤ « BOLLORÉ Gwenn-Aël - Moïra la naufrageuse » ¤ « Etienne Le Grand, clichés du tournage du film "Les Naufrageurs" de Gwenn-Aël Bolloré » ¤
Présentation
Pour rendre compte de la sortie du film des Naufrageurs [1] et de l'avant-première au cinéma Odet-Palace de Quimper, le journal national Détective détaille la rencontre amoureuse du producteur Gwenn-Aël Bolloré [2] et l'actrice Renée Cosima [3] son épouse.
Le mariage est évoqué avec l'idée d'un abandon difficile de carrière de comédienne : « Ils se marièrent. Ils eurent une petite fille qui s'appelle Anne et qu'on appelle Pomme. Ils furent, ils sont très heureux. Mais au cœur de Renée sommeillait toujours l'amour du théâtre. »
Mais, bien heureusement le film des Naufrageurs fut l'occasion pour Gwenn-Aël Bolloré de se rattraper : « Alors il lui écrivit une belle histoire de la côte bretonne et lui offrit, comme un bijou, un rôle fascinant et sans amour. »
Un rôle sans amour, car « pénible, brutal ... Moïra n'est pas aimée dans son île de rudes pêcheurs. Elle vit à l'écart. Chacun la fuit et souhaite ardemment son départ. »
Mais le titre de l’article accrocheur reste romantique et fleur bleue : « Renée Cosima a reçu le plus beau gage d’amour », grâce à ce film.
Les photos de Jean-Gabriel Seruzier sont un mélange de scènes du film, de diners littéraires, dont l'un avec « le grand Jouvet », et familiales en couple et avec leur fille « Pomme » (Anne).
Transcription de l'article
Avec le film "Les Naufrageurs", que Charles Brabant a tiré du roman de Gwenaël Bolloré
Renée Cosima a reçu le plus beau gage d'amour
Quimper (de nos envoyés spéciaux)
Ce soir-là, on était venu du bout du monde pour aller au cinéma. Dans la salle de l'Odet-Palace, à Quimper, les noirs costumes traditionnels du pays breton dressaient leur haute coiffe pure parmi les robes dernières nées de la couture parisienne. Cela créait une étrange atmosphère d'irréalité. C'était une Première pas comme les autres, pour un film encore chargé de mystère et de légendes, tourné dans le farouche décor de la pointe de Penmarc'h. Dirigés par le metteur en scène Charles Brabant, les habitants de Kerity et de Saint-Guénolé y avaient ressuscité de rudes personnages d'autrefois, au temps où la misère était si grande sur les côtes bretonnes qu'on y suscitait des naufrages pour piller les bateaux jetés à la côte.
Comme dans les films néo-réalistes italiens, on avait choisi des gens du pays, des gens au visage buriné par le vent.
On sait bien qu'il n'y a plus, depuis la nuit des temps noirs, de naufrageurs en Bretagne.
On sait bien que, sur les côtes les plus meurtrières du monde, il n'existe plus que des marins qui se jettent dans l'enfer des tempêtes pour sauver d'autres marins. Que des êtres solidaires ...
Approfondis par 15 ans de méditation
Elle ne cessait pourtant jamais de vouloir. Vouloir, farouchement, vivre. Vouloir, obstinément, guérir. À mesure qu'elle grandissait, un mal pire que l'offensive permanente de la douleur et de la mort la torturait moralement, l'obligeait à se détourner des miroirs et à s'évader de la compagnie des enfants de son âge. Renée louchait. Un affreux strabisme né de sa diphtérie la défigurait. Elle ne savait même pas si elle aurait pu être jolie. Cachée derrière ses lunettes, elle refusait de se voir. Mais elle s'acharnait à rêver. Malgré son regard infirme, malgré le mal qui la harcelait, elle rêvait qu'elle deviendrait comédienne.
Derrière les verres teintés qui refusaient à la vie son regard malade, elle demeurait fière, intacte et pure, préservée des jeux de l'adolescence et des roueries des fausses amours. Patiente, obstinée, elle préparait son avenir, l'avenir de Renée Cosima. Il fallait guérir d'abord, et faire opérer ses yeux.
Lucienne MORNAY
Reportage photo : J.-G. SERUZIER
Coupures de presses
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Annotations
- ↑ Naufrageur, s.m. : celui qui provoque volontairement le naufrage d’un navire, à la différence du pilleur d'épave qui se contente de piller un navire déjà échoué (une épave). Source : Wikipedia. [Terme] [Lexique]
- ↑ Gwenn-Aël Bolloré (1925-2001) : jeune résistant, écrivain et poète, Gwenn-Aël Bolloré a été vice-président des Papeteries Bolloré de 1952 à 1974, et P.-D. G. des Éditions de la Table Ronde. Ami des artistes, il a entretenu des relations étroites avec le monde littéraire et cinématographique. Amoureux de la mer et correspondant du Musée d'Histoire naturelle de Paris, il a également créé le Musée Océanographique de l'Odet dont il fut le conservateur.
- ↑ Yvonne Henriette Renée Boudin, née en 1922 à Neuilly-sur-Seine, et décédée en 1981 à Ergué-Gabéric, est connue sous son nom d'actrice Renée Cosima. Elle épouse, en 1957, l'homme d'affaires Gwenn-Aël Bolloré. Elle joue notamment la sorcière Moïra dans le film « Les Naufrageurs » de Charles Brabant.
